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Genre : Vie de femmes immigrantes à Cotonou
Découverte
Genre : Vie de femmes immigrantes à Cotonou
Ange Banouwin 🇧🇯
Ange Banouwin 🇧🇯
March 15, 2024

Le genre est une thématique observable au cœur de la migration dans la sous-région ouest africaine. Partie intégrante des diverses communautés vivant au Bénin, les femmes sont l’une des plus vulnérables. Entre volonté d’intégration, d’opportunités d’affaires et autres enjeux, le vécu de ces femmes à Cotonou illustre la réalité de cette couche sociale, qui se révèle comme l’un des principaux acteurs au cœur de la migration sous-régionale.

La féminisation de la migration est l’une des grandes tendances du phénomène migratoire mondial et, notamment, africain. En 2020, les femmes représentaient 48,1 % du stock mondial de migrants et 47,1 % en Afrique, selon des données publiées en mars 2023 par la plateforme The Conversation, fondée sur des enquêtes conduites dans neuf pays, intitulé « Regard actuel sur les mobilités féminines transfrontalières ouest-africaines ».

L’acquisition de l’autonomie économique, l’amélioration de leurs conditions de vie ainsi que l’évolution de la perception du rôle et du statut des femmes grâce à la migration conduisent à une reconfiguration des relations familiales et sociales entre les sexes, selon cette étude.

Ce matin où nous rencontrons Joséphine au cours d’un rassemblement de ressortissants de son pays à Cotonou, la métropole du Bénin, elle était préoccupée. Pour toute réponse à Dialogue Migration, « J’ai des problèmes…», lâche-t-elle. Elle n’en dira pas plus. Au nombre des membres de cette communauté, les femmes sont estimées à plus de 50% de la centaine de personnes réunies.

Thérèse, elle aussi, est arrivée de Bénin aux environs de trois semaines quand Dialogue Migration l’a rencontrée. Cette Camerounaise est venue dans le pays suite à l’invitation d’une de ses amies Tchadienne qui réside à Cotonou. Thérèse qui était restée au Tchad où elle a été hôtesse pour la promotion d’une marque de téléphone mobile a gardé le contact avec cette dernière. Le projet de restaurant-bar qu’elle devait mettre en place avec la Tchadienne à Cotonou n’a finalement pas prospéré. Entre la déception et le retour au pays, ou s’installer au Bénin, Thérèse qui a englouti ses économies pour son vol Douala-Cotonou, et les démarches infrastructurelles du projet reste partagée. « Je suis venu pour un projet avec une de mes copines résidente ici au Bénin. Mais le projet n’a pas pu se réaliser. Je vais voir si je peux avoir d’autres opportunités d’emploi ou carrément retourner au pays », confesse-t-elle. Le regard préoccupé elle ne manque de relever pour une femme hors de son pays les difficultés qu’on peut rencontrer. Mère d’une fille restée au Cameroun avec sa maman, désormais, sa principale préoccupation est de trouver un emploi pouvant lui permettre d’envoyer régulièrement de l’argent a sa mère pour prendre soin d’elle.

Au Bénin, le salaire minimum interprofessionnel garanti  (SMIG) est  de 52.000 francs CFA depuis le 1er janvier 2023. « Moi qui suis une étrangère je vais faire quoi avec ? Il faut que je loue, m’entretenir et envoyer quelque chose au pays», se préoccupe Thérèse, même si le coût de la vie à Cotonou n’est pas le même que celui de Douala. Dans la métropole béninoise, pour certains employeurs du privé, il n’est pas évident de payer cette somme qui était de 40.000 francs CFA, qu’ils n’arrivaient à honorer. Thérèse, pour sa part, espère au moins 60.000 francs de salaire afin de pouvoir se mettre à sa propre compte, actuellement en colocation avec son amie, et subvenir à ses besoins ainsi que ceux de sa famille. «Comme je sais faire la tenue de caisse et de par mes expériences au Cameroun et au Tchad où j’ai travaillé pour la promotion d’une marque de téléphone, la seule offre intéressante qu’une dame m’a faite pour servir et tenir la caisse de son restaurant est de 40.000 francs CFA», informe-t-elle. 

Mis à part cela, les autres propositions ne semblent pas l’accrocher. «Tous les travaux qu’on me propose sont des travaux de nuit , serveuse au bar ou dans les maquis. Le salaire n’est pas bon…», fait-elle remarquer.

Intégration réussie

Certaines femmes migrantes résidentes au Bénin, arrivent malgré les péripéties à s’intégrer et s’épanouir. Tenant un maquis dans les environs du stade de l’amitié, Sephora est une ivoirienne. Venue au Bénin dans le tumulte de la crise ivoirienne de 2010-2011, de ses propos sa condition de réfugiée reste peu connue. «Les gens n’ont jamais su qu’on est des réfugiés. La cuisine ivoirienne est très appréciée et on ne manque pas de clientèle», avoue-t-elle, surprise d’être approchée en cette qualité, suite à une recommandation d’une de nos sources responsable d’association de réfugiés vivant au Bénin. Toutefois elle a des relations avec le l’Agence Nationale de la protection civile (ANPC) , jusqu’en 2021 où les réfugiés ivoiriens ont été démobilisés pour retourner dans leur pays grâce au dialogue instauré par les dirigeants politiques. 

Au Bénin, durant la crise, il n’y avait pas de camp pour les réfugiés. Ils vivaient au sein de la population chacun dans son cadre de convenance et soutenu par l’ANPC avec l’appui du HCR.  En dehors d’elle, au quartier Akpakpa, l’un des coins animés de Cotonou, une autre ivoirienne tient un restaurant de renom, avec pour spécialité les mets ivoiriens. Son maquis porte le nom d’un de ses mets et est objet d’une grande attraction. On y retrouve des ivoiriens, des Béninois et autres amoureux de la cuisine ivoirienne. Comme bon nombre d’Ivoiriens venus au Bénin durant la crise post-électorale de 2010-2011, ces dernières sont restés dans le pays où elles ont trouvé une terre d’asile et d’épanouissement de leurs affaires. Hormis ces derniers, d’autres vivaient dans le pays depuis très longtemps. Venus en immigration, ils se sont installés et se sont réalisés.

Situation en demi-teinte…

Au Bénin, la situation de certaines femmes migrantes n’est pas toujours reluisante. Notamment les serveuses des bars et autres. Une situation qui n’est non plus dramatique comme dans certains pays bien qu’elles ne soient pas lotis au point qui puisse satisfaire des défenseurs du droit de travailleurs, dont la Confédération des syndicats autonomes du Bénin (CSA-Bénin), selon son Secrétaire général, Anselme Coovi Amoussou.

« Quand vous restez dans le rang des migrants bourgeois entre griffes, ceux qui sont dans un emploi formel qui ont fait une migration régulière ; assez souvent il n’y a pas de différence de traitement en tant que tel. Mais on sait que la grande majorité se retrouve dans l’économie informelle», note le SG de la CSA-Bénin, qui s’investit pour la cause des travailleurs migrants au Bénin. Évoquant le cas des serveuses de bars, majoritairement originaires du Togo, « Là c’est la catastrophe », relève-t-il. Elles vivent tout et son contraire indique le syndicaliste. «Il n’y a pas de salaire parce que ce qu’on donne on ne peut pas l’appeler salaire ; elles n’ont pas de couverture sociale, elle n’ont pratiquement aucun droit. Quand l’employeur décide de les virer, il les vire. Parfois, il y a des droits de cuissage pour commencer à travailler. Elles vivent dans des conditions déplorables. Parfois, elles sont entassées dans de petites chambres où elles sont à plusieurs. Et dès lors que le patron décide que vous ne pouvez plus travailler ou on vous reproche quelque chose qui est mineur. A ce moment-là, vous devez partir », décrit Anselme Coovi Amoussou.

Toutefois, des organisations de migrants se mettent peu à peu en place au Bénin, pour la défense de leurs droits ; dont celle des femmes de la CEDEAO, qui a en son sein une composante des femmes. Au sud du pays, il est noté que la majorité des migrants est de sexe féminin, soit 51.5%. En moyenne 27% de la population ces femmes migrantes ont entre 20 à  30 ans, selon les données publiées par Gender Links en 2015. 


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