
De plus en plus de Togolais vivant à l’étranger acquièrent la nationalité de leur pays d’accueil tout en conservant un fort attachement à leur terre natale. La question centrale est la suivante : la double nationalité, est-elle une opportunité pour le Togo ou constitue-t-elle un obstacle à une réintégration harmonieuse des ressortissants de la diaspora ? Ce débat soulève des enjeux juridiques, politiques et sociaux profonds.
Le cadre juridique : entre prohibition et tolérance
La loi togolaise, Ordonnance 78-34 du 7 septembre 1978 et Code de la nationalité, interdit formellement la double nationalité, mais des exceptions pratiques existent, notamment pour les enfants nés de parents binationaux ou les conjoints étrangers. En réalité, l’État ne revêt pas toujours ces obligations, entraînant un flou juridique.
En théorie, un Togolais qui acquiert volontairement une autre nationalité perd la nationalité togolaise, sauf autorisation expresse du Conseil des ministres.
En pratique, le gouvernement tolère la double nationalité pour ceux y nés, ou pour les conjoints étrangers, sans que cela ne soit jamais formellement appliqué .
Enjeux politiques : participer pleinement à la citoyenneté
Le droit de vote à l’étranger, introduit récemment, reste confidentiel : seuls 348 Togolais ont pu voter depuis l’étranger lors de l’élection de 2020. Malgré la volonté d’intégration politique, les binationaux se heurtent à des procédures lourdes, des suspicions d’allégeance, voire à un refus implicite de reconnaissance.
Opportunités économiques ou obstacles juridiques ?
La diaspora représente un potentiel économique stratégique. Pourtant, l’accès aux secteurs régulés (foncier, immobilier, fonction publique) peut être restreint pour les binationaux. De plus, l’exigence du droit local prive certains de la possibilité d’investir pleinement.
Paradoxalement, depuis 2014, les Togolais “ayant perdu la nationalité togolaise” bénéficient d’une exemption de visa à l’arrivée, ce qui montre une volonté d’ouverture malgré des textes non clarifiés.
Réintégration : entre illusion et déception
Le retour au pays est souvent semé de désillusions : insertion difficile, soupçons d’être devenu “étranger” chez soi, perte de liens sociaux. Une réintégration réussie passe par des mesures d’accompagnement concrètes… qui restent marginales.
Outils mobilisés pour la diaspora
Le Togo a mis en place plusieurs dispositifs :
Ces efforts visent à stimuler l’engagement de la diaspora, mais restent entravés par un vide juridique persistant.
La double nationalité pourrait être une opportunité unique pour le Togo : atout économique, enrichissement culturel, connexion avec la diaspora. Mais pour que cela devienne réalité, il faut clarifier les textes, simplifier les procédures, et surtout changer le regard politique et social envers les binationaux. Il en va de la pleine réintégration de dizaines de milliers de Togolais de la diaspora.