Une étude met en lumière les réalités entre la Mauritanie et le Sénégal
La migration contribue au commerce et en bénéficie par la même occasion. Le commerce transfrontalier de petite échelle peut être défini comme une forme de commerce qui n’est pas enregistré dans les statistiques officielles et qui est effectué par de petites entreprises aux frontières des pays limitrophes ou voisins.
L’Organisation Internationale pour la Migration (OIM) a fait une étude en juin 2023 sur le commerce transfrontalier de petite échelle entre la Mauritanie et le Sénégal. Deux pays voisins. L’étude a été menée à la frontière sénégalo-mauritanienne, aux points de suivi des flux de Rosso et de Gouraye. Ces deux points ont été choisis sur la base de leur importance stratégique pour l’étude de par le nombre élevé de voyageurs y transitant tous les jours par rapport à d’autres points transfrontaliers entre ces deux pays.
L’étude indique que les activités de collectes ont permis d’obtenir des informations sur : les flux de petits commerçants et leur profil ; les expériences et les besoins des commerçants transfrontaliers voyageant entre la Mauritanie et le Sénégal ; leur profil démographique et socio-économique, leurs pays d’origine et de destination ; les motifs de leur voyage ; leurs attentes et ambitions, leur expérience migratoire et leurs besoins au cours de leur voyage.
Dans le cadre de ce projet, les données recueillies à Rosso indiquent que 43% des individus sont des hommes adultes, 40% sont des femmes adultes, 6% sont des filles et 11% sont des garçons. Quant à Gouraye, il a été observé 29% d’hommes adultes, 45% de femmes adultes, 14% de filles et 12% de garçons. Les enquêtes individuelles ont montré une prédominance de femmes commerçantes par rapport aux hommes, avec 67 pour cent de femmes contre 33 pour cent d’hommes.
Les types de marchandises qu’échangent les petits commerçants sont diverses, passant de denrées alimentaires à du matériel électronique (5%). La majorité des commerçants marchandent des denrées alimentaires périssables (53%) ou non-périssables (24%). Les produits cosmétiques et articles domestiques forment 26 pour cent des marchandises, s’ensuivent les animaux vivants (8%) et autres denrées (22%).
Pour plus de 54% des commerçants interrogés, la moyenne mensuelle de leurs revenus se situe en dessous de 5,000 ouguiyas mauritaniennes (MRU) ce qui équivaut à une somme inférieure à 88,000 francs CFA (XOF) ou 144 dollars américains (USD). Un peu plus de 25 pour cent des répondants ont affirmé avoir un revenu mensuel moyen variant entre 5,000 et 10,000 MRU (88,000-177,000 XOF ou 144-288 USD) et seulement 21% ont rapporté des revenus mensuels plus élevés que 10,000 MRU (177,000 XOF ou 288 USD).
Des cas de vulnérabilité notés chez les femmes
Un certain nombre de cas vulnérables ont été rapportés par les participants dans le cadre du SSCBT (Small-Scale Cross-Border Trade). Ce sont surtout les femmes, parfois en situation de handicap, les jeunes filles, ainsi que les hommes souvent âgés et/ou souffrants de diabète, particulièrement à Gouraye. Ces populations sont exposées à un risque accru de danger, considérant la traversée de la frontière qui se fait pour presque la totalité des voyageurs en pirogue, comme observé lors des enquêtes individuelles et confirmé lors des discussions. Les participants ont rapporté que les mesures de sécurité y sont restreintes et qu’en cas d’incident, les passagers sont livrés aux piroguiers et à eux-mêmes pour leur sauvetage.
Les tarifs douaniers jugés trop élevés
Les petits commerçants sont confrontés à plusieurs difficultés dans l’exercice de leur activité transfrontalière comme l’ont révélées les discussions de groupe. En effet, le passage de la frontière leur est coûteux, tant au niveau du transport, qu’aux taxes qui leur sont demandées de couvrir. Les tarifs douaniers applicables à leurs marchandises étant considérés comme trop élevés pour le revenu limité que dégage leur commerce, les commerçants ont souvent recours à l’endettement afin d’éviter qu’une partie de leurs marchandises leurs soient confisquées, selon les acteurs clés. Aussi, l’attente prolongée aux frontières due aux réglementations administratives applicables et au remplissage des pirogues leur font perdre un temps précieux qu’ils pourraient consacrer à leur activité commerciale.
Commerçants et communautés transfrontalières font bon ménage
En outre, il ressort des résultats de l’étude que les relations entre les commerçants et les communautés transfrontalières ont été qualifiées de bonnes par l’exclusivité des participants, les deux acteurs coexistant sans problèmes. Il arrive parfois que des conflits naissent entre clients et commerçants ou entre grands et petits commerçants, ces derniers étant accusés d’occuper un espace clé aux devantures des magasins, diminuant ainsi la visibilité des vitrines. Toutefois, ces incidents n’ont été que peu relevés par les participants et les discussions se sont portées en grande partie sur les conflits entre commerçants et autorités aux frontières.
De plus, l’étude montre qu’avec l’application des restrictions aux frontières, les petits commerçants ont essuyé une perte considérable, voire totale, de leurs gains. De ce fait, les économies faites dans l’espoir d’investir dans des marchandises ont dû être dépensées afin de subvenir aux besoins primaires des familles. Lors de la reprise des activités transfrontalières entre la Mauritanie et le Sénégal, les commerçants n’ont eu d’autre choix que de s’endetter afin d’acquérir de nouvelles marchandises et de reprendre leur activité commerciale.
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