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L’engagement citoyen du Tchadien Masbé Ndengar  au Burkina
Témoignage
L’engagement citoyen du Tchadien Masbé Ndengar  au Burkina
Ange Banouwin 🇧🇯
Ange Banouwin 🇧🇯
August 30, 2025

C’est l’une des figures du journalisme et de l’activisme dans son pays d’adoption. La trentaine, il se définit comme un citoyen du monde de par son engagement sociocommunautaire et à pour leitmotiv : « se battre avec les autres pour un monde meilleur ». Dialogue Migration vous plonge au cœur de son intimité, itinérant entre le Tchad son pays d’origine et le Burkina Faso, celui d’adoption.  

« J’ai choisi de m’orienter vers les médias, mais c’est l’activisme qui s’est imposé à moi, ne me laissant aucun choix. Face aux injustices sociales flagrantes qui touchent de nombreux pays africains, il devient impossible de rester silencieux », déclare à Dialogue Migration Masbé Ndengar.

Malgré son profond attachement pour le Tchad et pour l’Afrique en général, Ndengar a à chaque retour au bercail un ressenti qui le rend peu enthousiaste.

Sensible aux injustices observées dans son pays d’origine comme certains de la sous-région, en 2011, alors qu’il était en première année de Communication, il a décidé de lancer son blog intitulé « Tchad Révolution », un espace où les mots prennent vie pour éveiller les consciences. Depuis lors, il ne cesse de s’exprimer, en proposant des actions concrètes. À sa plume, il associe l’engagement sur le terrain.

« Devant les abus observés au Tchad, mes camarades et moi sommes descendus manifester devant l’ambassade du Tchad au Burkina Faso », renchérit-il. 

Tchadien d’origine, vivant au Burkina Faso depuis son enfance, alors âgé de 10 ans, il est originaire de Bodo, dans la région du Logone Oriental, au Sud du Tchad.

Journaliste dans les médias au Burkina Faso et au Tchad, et producteur de contenus pour Dialogue Migration, et formateur en communication digitale, notamment sur le Mobile Journalisme (MOJO), les techniques de rédaction et l’animation web : « En ce qui concerne les médias, j’ai choisi d’être journaliste, un métier que j’aime profondément. La communication comme le journalisme utilise les médias, et ceux-ci amplifient la voix des activistes. J’ai d’ailleurs créé mon propre média avant d’intégrer des structures professionnelles. Cependant, je distingue clairement mon engagement d’activiste utilisant les médias pour se faire entendre, de mon rôle de journaliste, dans lequel je fais la part des choses », précise-t-il.  

Intégration africaine et respect des textes du pays d’adoption

« Je suis arrivé ici étant enfant, ce qui m’a permis de grandir comme tous les autres enfants du quartier. Dans ces quartiers, tout le monde se connaît, et selon une éducation à l’africaine, chacun peut corriger un enfant qui fait une erreur. Je n’ai jamais bénéficié d’un traitement de faveur simplement parce que j’étais Tchadien », dit Ndengar.

Sur le plan professionnel, il n’a pas rencontré de difficultés particulières. « J’ai eu la chance d’intégrer le monde du travail dès ma troisième année d’études. En Master, j’étais déjà salarié. J’avais postulé pour un stage afin de soutenir mon mémoire de Licence en Communication. J’ai travaillé avec sérieux et, par la suite, Droit Libre TV a recruté du personnel. J’ai postulé au poste de Community Manager et j’ai eu la chance d’être embauché. J’y ai exercé plusieurs fonctions : journaliste-reporter d’images, chargé de communication de projet, formateur, entre autres ». 

Plus tard, il a intégré suite à un recrutement Radio Jeunesse Sahel, où il a occupé le poste de Responsable Web et Réseaux Sociaux en tant que Tchadien, au sein d’une équipe multiculturelle. Une initiative de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) en partenariat avec le G5 Sahel (Mali, Mauritanie, Niger, Tchad, Burkina Faso).

« Ce qui m’a particulièrement marqué, c’est qu’au Burkina Faso, les recrutements se font sans considération d’origine ou d’identité : si vous méritez un poste, vous l’obtenez sans contestation. Ce n’est malheureusement pas le cas partout, et c’est ce qui fait que je ne ressens aucune inquiétude lorsque je postule à un emploi », dit-il.

Dans l’exercice de sa profession de journaliste, sa nationalité ne lui constitue pas un obstacle. Il bénéficie des mêmes droits que les autres journalistes travaillant au Burkina Faso. 

« Je possède une carte de presse délivrée par le Conseil Supérieur de la Communication (CSC) et je peux accéder aux mêmes sources d’information. En réalité, bien que je sois Tchadien, je me considère comme un journaliste burkinabè, car j’exerce dans des médias burkinabè soumis à la législation locale. Mon travail m’amène à parcourir tout le territoire pour couvrir divers événements et activités. Ma nationalité n’a jamais posé de problème jusqu’à présent », dit-il.

Engagements et perspectives

Le parcours de Ndengar est caractérisé par sa détermination, sa résilience, son courage et sa volonté. Éloigné de sa famille et de son pays, ses défis sont nombreux : « Pour réussir professionnellement, il est nécessaire de se battre, comme tout un chacun. Ce qui porte réellement ses fruits, c’est un travail rigoureux, surtout dans un environnement aussi compétitif. À cela s’ajoutent la discipline et le respect strict des normes et règles établies par la société », indique-t-il. 

Aujourd’hui, sa principale préoccupation est celle de la jeunesse africaine au sujet de l’intégration du continent et de l’unité africaine.  

« J’aspire à ce que chaque Africain puisse s’installer librement dans n’importe quel pays africain, sans craindre d’être rejeté ni subir de contrôles excessifs. Il est important que le traitement ne dépende pas du pays d’origine. Je rêve d’une Afrique perçue comme un seul pays, où les différentes nations seraient simplement des provinces. Personnellement, je me présente comme un Africain originaire de la province du Tchad ».

En dehors de ses occupations de  journaliste et ses conseils avisés en communication, Ndengar est passionné par l’humanitaire. Ce dernier lui permet de s’engager à offrir un peu de réconfort à ceux qui en ont le plus besoin, en particulier aux populations vulnérables. Il invite les non-nationaux résidents aux Burkina, ou dans d’autres pays d’Afrique, de par son expérience à ne jamais se considérer comme un étranger : « C’est une barrière terrible qu’on dresse contre soi-même. Il faut vivre comme tout un chacun, en respectant les lois et les valeurs du pays d’accueil ». Cependant, il note que certains emplois ou activités sont parfois réservés aux nationaux, mais pour tout ce qui est accessible à tous, il faut oser saisir les opportunités. Mais également, il est essentiel de contribuer au développement tant du pays d’accueil que de celui d’origine, souligne-t-il. 

Regard sur la libre circulation des Africains  

Le cœur de Ndengar se serre lorsqu’il constate que des pays africains maltraitent d’autres Africains : « Mon âme tremble à l’idée que, sur notre propre continent, des êtres humains soient encore vendus comme des marchandises, notamment en Libye. L’avenir m’inquiète lorsqu’on voit des Africains considérer leurs semblables comme des sous-hommes, les réduisant à de simples bêtes de somme. J’imagine Kwame Nkrumah se retourner dans sa tombe, voyant son rêve d’unité africaine trahi par des frontières, des visas et des cartes de séjour imposés entre frères africains ».

Voyager, que ce soit en Afrique ou ailleurs, ne devrait pas être une faute, soutient-il fermement. « Chaque individu appartient à l’humanité, au monde entier. Ce qui pose problème, ce n’est pas le déplacement, mais l’obstacle que l’on met à la liberté de circuler naturellement. Or, ce qui est naturel finit toujours par reprendre sa place, malgré les tentatives pour l’étouffer », dit-il plein d’espoir en l’avenir.

Pour lui, il est temps d’ouvrir les frontières et favoriser la libre circulation, afin que chacun puisse contribuer à l’émergence d’un monde meilleur. En attendant que ce rêve devienne réalité, Ndengar invite les jeunes Africains à donner la priorité à la mobilité intra-africaine. 

« En effet, la majorité des migrations africaines se font déjà à l’intérieur du continent. Protégeons nos vies. Refusons les chemins de la mort. Le Niger a besoin de nous ! Le Mali nous appelle ! Le Bénin nous attend vivants ! Le Burkina Faso compte sur nous ! Le Sénégal, le Tchad, le Togo, le Cameroun, la Centrafrique… tous attendent des hommes et des femmes debout et en bonne santé. En un mot : l’Afrique a besoin de nous ! », convie-t-il.

Dans cette perspective, Ndengar se définit comme un Africain de la province du Tchad, et mieux : un Citoyen du Monde ; l’Afrique faisant partie des cinq continents qui constituent le monde.


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