![Pêche artisanale maritime au Bénin : Plus de 25 % de la main d’œuvre assurée par des ressortissants de pays voisins](/static/b0c374dd08fe0d431d2b2d911ff6f170/7739a/b5a28ec3-c285-41f0-9094-a0c4268d99aa.jpg)
Au Bénin, des non-nationaux jouent un rôle important dans le développement de la pêche artisanale maritime. Ils sont l’un des potentiels artisans qui contribuent à l’approvisionnement en ressources halieutiques au port de pêche de Cotonou, tout comme dans les cités balnéaires au sud du Bénin, le long du littoral de ce pays côtière du Golfe de Guinée, en Afrique de l’ouest.
La main-d’œuvre originaire des pays voisins joue un rôle important dans la pêche artisanale maritime au Bénin, suivant le constat effectué par Dialogue Migration. Du port de pêche de Cotonou en passant par les cités balnéaires de Ouidah, Grand Popo, Illacondji et autres le constat reste le même.
Cette matinée de septembre 2023, au port de pêche de Cotonou, des bateaux de pêche accostent à l’embarcadère-débarcadère, leurs provisions dans les filets. C’est le retour de la mer après des heures de pêche. Sur la rive, après des heures d’attente à observer le large, les attentes semblent comblées avec ce retour de ces barques motorisées. Comlan Yaovi, pêcheur collecteur d’une structure marchande de pêche, manage une équipe de pêcheurs sur le quai. Après un temps d’activité avec son équipe, il se prête aux questions de Dialogue Migration. « Principalement, il y a plus de Ghanéens parmi nous, ensuite on a les Béninois. Mais, au port de pêche, ce sont les Ghanéen qui sont les plus représentatifs », illustre-t-il.
Les acteurs de la pêche maritime artisanale au Bénin, explique-t-il, « Ce sont eux qui sont en première ligne, car c’est dans cette activité qu’il sont nés. Ils en ont l’expertise. Ces derniers ont également des représentants, mais sont sous l’autorité des Béninois, qui sont propriétaires des bateaux de pêche et des filets. Ils maîtrisent le type de pêche appelé ”Watcha” et ils sont endurants…», ajoute-t-il.
Sur les lieux, la langue la plus usitée est le Mina. Une langue commune aux peuples côtiers du Bénin, du Togo et du Ghana, et principalement parlée au Togo voisin. Face à ce constat, « Les Ghanéens parlent le mina, c’est pourquoi les Togolais ne sont pas nombreux ici. Il n’y en a que quelques-uns», fait observer, Comlan Yaovi.
Le melting-pot de main d’œuvre
Sur les bateaux de pêche artisanale, flottent divers drapeaux de différents pays. Entre autres, on observe les drapeaux du Bénin et du Ghana. Ces drapeaux sont des objets décoratifs et aussi d’identification à distance afin que de loin les bateaux soient perçus par d’autres pour éviter des collisions, renchérissent nos sources.
Sous un hangar jouxtant un atelier de maintenance d’où ronflent des moteurs de barques, une dizaine de pêcheurs assis sur des nattes préparent des filets, achetés à Lomé, la capitale du Togo voisin.
Selon les sources d’associations de pêcheurs artisanaux maritime, on dénombre plus de 1.000 pêcheurs au port de pêche de Cotonou.
Assis et travaillant parmi ses pairs Dossou Dossa Kouassi, président de l’Association des pêcheurs marins et assimilés de Cotonou (APMAC), qui compte plus de 800 pêcheurs, prend congé d’eux pour s’entretenir avec Dialogue Migration, à sa table installée à l’autre bout du bâtiment.
« Parmi les pêcheurs qu’il y a ici, il y a au moins 25% de Ghanéens, 15% de Togolais, 2 ou 3 % de Nigérians », indique l’homme de la cinquantaine. « Arrivé à n’importe quelle plage, on trouve les Xla, les Houéda et les Togolais, surtout les Xla (les Xla et les Houéda sont des Béninois, ndlr) », ajoute-t-il.
Par ailleurs, Dossou Dossa Kouassi, précise que pendant la saison de pêche ceux de Grand-Popo, Aïguinnou, Agoué, et Kraké viennent au port embarcadère-débarcadère de Cotonou.
Levant un pan de l’histoire de leur activité, « Nos grands-parents et nos pères, nos sages et nos vieux ont été au Ghana apprendre le métier de la pêche, pour venir au Bénin », raconte-t-il. « Cependant jusqu’à nos jours, les barques sont achetées au Ghana, et une bonne partie de la main d’œuvre y provient ».
Des types de pêche et la main d’œuvre afférente
L’activité de pêche artisanale maritime au Bénin revêt quelques particularités. Généralement les propriétaires de filet de pêche et des bateaux de pêche sont des Béninois. Cependant, afin de mener à bien cette activité, les Béninois propriétaires des filets et de barques vont au Ghana chercher la main d’œuvre qualifiée pour travailler pour eux. Ceux-ci sont rémunérés à la fin de la saison de pêche qui s’étend normalement de juin à Février. Toutefois, cette période semble connaître des modifications en raison des changements climatiques. Nos sources n’ont pas souhaité se prononcer sur les modalités de la rémunération. Cependant en ce qui concerne la demande de main-d’œuvre , « C’est en fonction de la pêche que je veux faire, que je vais aller chercher les gens au Ghana », indique le président de l’APMAC. « La senne de plage nécessite une main d’œuvre nombreuse; il faut au moins 40 personnes », indique-t-il. « Une fois au Ghana et le type de pêche décidé, premièrement, il y aura un bosco qui va chercher les ouvriers qualifiés. Si l’équipage vient, vous allez tenir une réunion, et dire ce que vous voulez faire», détaille le président.
« Pour la pêche au requin, il faut 7 à 8 personnes; pour la senne tournante 12 à 15 personnes ; pour exocet au moins 8 personnes. Si c’est ce qu’on appelle ‘’Sovi’’, si vous êtes trois ou quatre c’est bon, et si c’est ‘’Tohoungua’’, 5 ou 6 personnes peuvent suffire », précise-t-il. Et à chaque type de pêche, le filet afférent.
Tordro Doviaou Tegbikpota, est l’un des Ghanéens les plus anciens au Bénin du secteur de la pêche artisanale maritime. « Je suis ici il y a longtemps, cela avoisine déjà 50 ans. Aujourd’hui, je pourrais dire que je suis natif du Ghana mais je me considère comme un Béninois », dit-il, assis au milieu d’autres Béninois. Aujourd’hui, il est propriétaire de bateaux de pêche et de filets. Il s’est marié et a eu des enfants qui à leur tour se sont mariés au Bénin.
La Pêche au Bénin est un secteur d’activité important à l’économie du pays. Elle contribue pour 3 % au PIB, offre plus de 600 mille emplois et occupe plus de 15 % de la population active. La pêche maritime et la pêche continentale sont les deux grands domaines de pêche dans le pays. Selon les statistiques de l’administration publique, la production béninoise est montée à 82.000 tonnes de poisson en 2020. Cependant, les besoins locaux sont couverts par la pêche béninoise à 34%.
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