Ils sont jeunes, ambitieux, et ont choisi le Burkina Faso pour y poursuivre leurs études supérieures. De retour au Tchad, ces anciens étudiants partagent leurs expériences riches et variées, entre apprentissage académique, découvertes culturelles, et engagement personnel. Leurs parcours témoignent de la réalité d’une migration éducative porteuse d’espoir, de défis et d’une vision renouvelée de l’Afrique. Ces témoignages révèlent une expérience partagée par ces jeunes tchadiens : une confrontation avec un autre environnement qui façonne leurs compétences, leur identité et leur vision de la migration. Au-delà de l’académique, c’est une aventure humaine et culturelle aux retombées durables, où le Burkina Faso s’impose comme une terre d’accueil, d’apprentissage et d’espoir pour l’avenir africain. 

Thierno Madjiam Ka-Mbaipa, ingénieur en génie civil : « Une terre d’hospitalité et de sérénité »

J’étais à Ouaga en 2016 pour suivre un Master 2 en Génie Civil, après avoir obtenu le diplôme d’ingénieur de conception en Bâtiment et Travaux Publics. Après un an d’études, j’ai réussi à m’insérer dans la vie professionnelle, ce qui a prolongé mon séjour jusqu’en janvier 2021. Le Burkina Faso est vraiment une terre d’hospitalité. Ouagadougou, ma ville de résidence, offrait une sécurité et une tranquillité qui permettaient d’être actif à tout moment, 24h/24, sans craindre aucune agression.Face à la situation actuelle du pays et à la lutte contre le terrorisme, nous sommes convaincus que le Burkina Faso connaîtra un véritable essor et deviendra bientôt un carrefour d’une Afrique

Roland Ngaryadji Madjirebaye, entrepreneur et expert en Systèmes d’information : « Un parcours d’enrichissement culturel et professionnel »

Mon séjour au Burkina Faso figure parmi les expériences les plus riches et formatrices de ma vie. Arrivé à Ouagadougou en février 2020, j’y ai poursuivi mes études jusqu’à l’obtention de mon Master en Management des Systèmes d’Information, tout en m’immergeant profondément dans la culture locale, la spiritualité partagée et le vivre-ensemble à la burkinabè.

Durant ces cinq années, j’ai pris part activement à de nombreux festivals culturels et religieux qui m’ont permis de découvrir la richesse et la diversité du patrimoine burkinabè. Ces événements majeurs incluent :

-FESPACO (Festival Panafricain du Cinéma et de la Télévision de Ouagadougou), vitrine du cinéma africain. 

-SIAO (Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou), carrefour du savoir-faire africain. 

-FITMO (Festival International de Théâtre et de Marionnettes de Ouagadougou)

-Les Récréâtrales, un festival important de théâtre et création dans les cours familiales. 

-FESTIMA (Festival International des Masques et des Arts) à Dédougou, qui célèbre les traditions masquées d’Afrique de l’Ouest

-Semaine Nationale de la Culture (SNC), moment fort d’expression identitaire burkinabè

-NAK – Nuits Atypiques de Koudougou, rassemblant musique, danse et arts vivants, etc. 

Ces instants ont renforcé mon sentiment d’appartenance à une Afrique plurielle mais unie. Avec du recul, je vois ma migration comme une étape stratégique et bénéfique dans mon parcours. Ce n’était pas une fuite, mais un acte de foi et d’espoir en un avenir meilleur. J’ai ainsi découvert une Afrique différente, humaine, disciplinée et créative. Au vu des défis actuels, sécuritaires, économiques et sociaux, il est crucial de repenser la migration comme un projet réfléchi, centré sur la quête de compétences, d’expériences et d’impact positif. Je prône une migration responsable, fondée sur l’apprentissage, le partage et le retour d’expérience au service de nos Nations.

En février 2021, un an après mon arrivée, j’ai intégré Supernet Technologie Holding comme professionnel en systèmes d’information. J’y ai travaillé jusqu’en décembre 2022, avant de devenir freelance, ce qui m’a permis de diversifier mes projets et d’élargir mes compétences. En décembre 2024, j’ai concrétisé mon rêve en lançant ma propre entreprise grâce aux connaissances et à la confiance acquises au Burkina Faso.

J’ai ensuite confié la gestion de cette entreprise à mon épouse, afin de pouvoir retourner au Tchad cette même année et y contribuer au développement local. Vivre et étudier au Burkina Faso a profondément transformé mon parcours. J’y ai fait de précieux souvenirs, tissé de véritables amitiés, et acquis un bagage culturel, intellectuel et spirituel inestimable. Je suis fier d’avoir été formé au cœur de l’Afrique de l’Ouest, porteur des valeurs d’unité, de travail, de dignité et de fraternité que ce pays m’a transmises.

Gracia Djeguedem, spécialiste en relations internationales : « Une ouverture au monde et à soi »

Je m’appelle Gracia Djeguedem Pitimbaye, diplômée en Relations Internationales, un domaine que j’ai eu la chance d’étudier à l’Université Libre du Burkina Faso. J’ai passé trois années au Burkina Faso, où j’ai achevé mes études universitaires. Cette période a été très enrichissante, autant sur le plan académique que sur le plan humain et culturel.

Durant mon séjour, j’ai su m’intégrer dans une communauté universitaire dynamique, diverse et ouverte. Vivre à Ouagadougou m’a offert l’opportunité de nouer des liens avec des étudiants venant de différentes régions, d’approfondir mes connaissances sur la culture burkinabè, et de développer ma capacité d’adaptation face à de nouveaux défis. Parmi les moments forts, je me souviens des soirées culturelles, des expositions et des activités inter-universitaires qui valorisaient la richesse des cultures africaines. J’ai également appris le mooré, l’une des langues nationales la plus parlée au Burkina Faso, et bénéficié des échanges avec les communautés du quartier.

Les défis liés au climat, à l’alimentation, et à parfois une certaine instabilité ont renforcé ma résilience. En prenant du recul sur la migration et à la lumière de l’actualité, je perçois la migration académique principalement comme une chance d’acquérir de nouvelles compétences. Aujourd’hui, je mesure combien cette expérience a été formatrice au-delà du savoir : elle m’a appris la patience, la tolérance et la capacité d’adaptation. Les débats actuels sur la migration en Afrique subsaharienne soulignent plus que jamais l’importance de la mobilité pour le partage des connaissances, tout en mettant en lumière les obstacles liés à la sécurité et à l’emploi.

Malgré ces difficultés, la migration estudiantine reste une expérience bénéfique qui permet de s’ouvrir au monde, de développer un esprit critique et de revenir contribuer au développement de son pays d’origine. Mon parcours au Burkina Faso m’a apporté une expertise pluridisciplinaire en relations internationales, ainsi qu’une meilleure compréhension des enjeux régionaux tels que l’intégration africaine, la diplomatie, la paix et la sécurité.

Grâce au réseau constitué sur place : professeurs, anciens étudiants, professionnels… j’ai pu multiplier les opportunités, que ce soit pour des stages ou des emplois à mon retour. Ma connaissance des contextes socio-politiques ouest-africains est aujourd’hui un atout important dans le domaine de la coopération internationale et des ONG. J’ai appris à vivre dans la diversité et à m’adapter à des environnements nouveaux. L’expérience, parfois marquée par la solitude ou le dépaysement, a renforcé ma confiance en moi et en ma capacité à surmonter les obstacles.

Cette aventure académique au Burkina Faso reste l’une des plus grandes richesses de ma vie, tant sur le plan humain que professionnel. Elle m’a permis de prendre du recul sur la migration : plus qu’un simple déplacement géographique, c’est une ouverture profonde sur le monde et sur soi-même.