
Après une longue traversée de l’Europe marquée par la précarité et la douleur, Mame Mor Diarra Dieng a choisi de revenir à Joal-Fadiouth, dans la région de Thiès (au Sénégal), pour bâtir une vie solide grâce à ses efforts et à son courage. Son histoire, empreinte de sacrifices et d’espoir, incarne la résistance d’une jeunesse qui refuse de se laisser abattre.
Sous un soleil ardent, la sueur perlée sur le front, un homme au teint noir debout au milieu d’une grande quantité de poissons séchés étalés sur des structures en bois. C’est Mame Mor Diarra Dieng. D’une grande stature, un regard direct et souriant, il se tient fièrement derrière ses étals de poisson fumé. Migrant de retour au pays après un long exil, l’homme à la corpulence moyenne incarne la lutte quotidienne pour survivre et bâtir un avenir meilleur au Sénégal.
De 2006 à 2017, Mame Mor quitte la pêche pour partir de Joal à Kafountine, puis se lance dans une aventure risquée : neuf jours en mer à bord d’une pirogue, avant d’être secouru par la marine espagnole après dix jours d’angoisse. « Quand les marins espagnols nous ont sauvés, ils nous ont emmenés dans un camp d’accueil. Nous y sommes restés 40 jours. Après, ils ont demandé si chacun avait des proches en Espagne, et j’ai appelé un membre de ma famille à Madrid », raconte-t-il avec émotion. La marine espagnole lui a offert le transport jusqu’à sa famille d’accueil, avec de l’argent de poche.
Son séjour en Europe dura 11 ans. En situation irrégulière, il travailla dans de petits commerces et dans l’agriculture. La vie y était rude : la police, la précarité, la distance avec ses proches. « C’était vraiment difficile. Je ne pouvais pas avoir un bon emploi et je me contentais de petits boulots », confie-t-il. La tragédie d’un ami, victime d’un accident lors de recherches de travail, fut un tournant décisif qui le ramena au Sénégal.
Le retour au Sénégal et la reconversion
De retour au Sénégal, encouragé par son frère, il se mit à transformer les poissons à Joal-Fadiouth. « Mon grand frère m’a prêté un local pour que je me lance dans la fumaison », explique-t-il. Depuis, il s’active dans ce secteur, achetant même un petit terrain pour faire sécher et fumer le poisson. Grâce à son métier, il parvient à financer son avenir, malgré la crise : la rareté et la cherté du poisson rendent son travail difficile. Il vend ses produits aux Burkinabés, à un prix compris entre 900 et 1100 francs CFA le kilo. Toutefois, les pertes sont fréquentes et l’avenir demeure incertain. Mame Mor Diarra songe parfois à repartir, mais cette fois, en respectant la légalité pour éviter les risques mortels de la migration irrégulière. Son conseil à ceux qui envisagent ce voyage : « Voyagez de façon légale, ou restez au Sénégal. »
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