Bienvenue sur Dialogue Migration podcast. Nous allons à la rencontre de Monsieur Salmane Diallo sociologue, depuis la Guinée Conakry, Nous parlerons dans ce podcast de l’émigration des jeunes guinéens sous l’angle sociologique, nous aborderons notamment les causes, les conséquences et les pistes de solution. Bienvenue à tous.
Bonjour Monsieur Salmane !
Bonjour !
Présentez-vous s’il vous plaît ?
Moi je suis Diallo Salmane, je suis socio-anthropologue de formation et enseignant-chercheur à l’Université de Labé
Nous allons parler aujourd’hui de l’émigration, qu’entendez-vous par l’émigration ?
La migration d’abord, est le mouvement des populations, d’une zone A, pour une zone B. Dans le concept de migration, nous avons l’émigration et l’immigration. L’émigration, c’est le fait de quitter une zone pour aller dans une autre. Donc, ceux qui sont dans la zone de départ parlent d’émigration, ceux qui sont dans la zone d’arrivée parlent d’immigration. Du point de vue de l’appréciation de la question, il y a la migration officielle et la migration clandestine.
Parlez-nous des causes de la migration sous l’angle sociologique…
Il y a fondamentalement plusieurs causes. Elles sont d’abord d’ordre économique qui sont les plus en vues et les plus récurrentes à chaque fois qu’il s’agit d’analyser la question migratoire. Alors la plupart de ceux qui quittent une zone pour une autre zone ont fondamentalement des raisons d’ordre économiques allant dans le sens de l’amélioration des conditions de vie. S’ils ne sont pas épanouis dans la zone où ils vivent avec le minimum pour pouvoir faire face à leurs besoins, beaucoup sont tentés de se déplacer dans l’espoir d’une vie meilleure ailleurs.
Ensuite, la cause peut être également d’ordre social. Beaucoup sont tentés de se lancer dans la migration par imitation à ceux qui sont partis et qui ont réussi et sont revenus avec un statut social de privilégié et une une certaine considération de la société. Cela pousse beaucoup dans cette quête de capital et de reconnaissance sociale.
Au-delà, les causes peuvent aussi être politiques. Dans la mesure où certains tentent l’aventure tout simplement parce que l’Etat n’a pas mis en place des conditions nécessaires pour leur réussite. Alors ils se lancent dans cette aventure, dans l’espoir d’avoir une vie plus épanouie dans des pays où le développement est beaucoup plus concret.
Enfin les causes sont également sécuritaires. Pour être à l’abri de la violence de la guerre et de l’instabilité socio-politique, les populations préfèrent quitter leurs zones naturelles d’habitation afin de se mettre à l’abri ailleurs. Cela est fondamentalement perçu aujourd’hui dans toutes les situations où on constate une instabilité socio-politique. C’est ce qui les prédispose quelque part à quitter leur zone où ils se sentent moins en sécurité pour aller s’abriter dans des zones où ils ont de l’espoir d’être protéger de toutes ces difficultés, de toutes ces contraintes.
Les causes géographiques ne sont pas également à exclure. Aujourd’hui, certaines zones ne sont plus propices à l’élevage ni à l’agriculture alors que beaucoup de populations vivent à travers ces activités. Cette perte de maîtrise sur l’environnement motive plusieurs populations à aller s’installer dans des zones où ils pourront valablement réaliser leurs activités et de satisfaire leurs besoins. Aujourd’hui avec le réchauffement climatique, on constate qu’il y a des endroits où la vie est devenue très dure avec la chaleur et le manque d’eau. Il y a assez de situations qui remettent fondamentalement en cause le bien-être des populations.
Quelles sont les conséquences de la migration ?
Les conséquences sont nombreuses et sont vécues dans les deux lieux. Dans les zones de départ, mais aussi dans les zones d’arrivée. Dans les zones de départ, c’est d’abord la fuite des cerveaux. C’est en quelque sorte un exode rural des matières grises. Ce qui fait que, par manque de ressources humaines, ces zones ne peuvent plus prétendre à un développement socio-économique.
De l’autre côté dans les zones d’arrivée, il y a le surpeuplement et cela peut remettre en cause quelques acquis de ces pays. Aujourd’hui si on parle de chômage, le chômage constitue un défi pour les politiques. Le fait qu’il y ait cette vague de population qui cherche à trouver un point de chute dans ces pays, peut contribuer à augmenter le taux de chômage. Le chômage qui augmente peut favoriser des contestations, la remise en cause du climat sociopolitique des pays en question.
A ce côté, il faudrait aussi mentionner le fait que ces pays qui accueillent peuvent être victime de certains comportements problématiques de la part de ces migrants. Aujourd’hui, le terrorisme prend de l’ampleur dans les pays d’accueil. Bien que n’étant pas du ressort exclusif des migrants, ces nouvelles formes de la violence contribuent fondamentalement à remettre en cause la sécurité de ces pays. Pour ce qui est des plus visibles.
Qu’est-ce que vous avez comme recommandation en tant que sociologue ?
Parler de recommandation, c’est une chose importante dans la mesure où au-delà de l’identification des causes, il faut chercher à mettre en place des dispositifs favorisant l’atténuation de ce qui conduit aujourd’hui à l’exacerbation du phénomène migratoire. Les solutions peuvent être envisagées sous plusieurs angles.
Il y a d’abord l’angle social. Si beaucoup partent, c’est lié fondamentalement aux pesanteurs sociales. Donc, une sensibilisation pourrait bien aider par exemple sur le fait qu’on peut réussir dans son pays. Et à travers l’entreprenariat on peut favoriser à ce que les gens se fixent, s’établissent et développent des activités qui peuvent leur permettre d’atteindre leur objectif.
Le deuxième aspect, c’est l’établissement d’un climat socio-politique apaisé. Parce que beaucoup considèrent aujourd’hui que l’entrepreneuriat est une solution qui pourrait aider à pallier le problème de la migration. Même si on a des idées entrepreneuriales sans un climat favorable, cela peut pousser ceux qui se sont lancés dans l’entrepreneuriat à abandonner pour tenter l’eldorado.
Aujourd’hui, nous constatons à chaque fois dans la région de la base côté, qu’il y a le champ de tel qui a été brûlé ou le bétail de tel qui a été attaqué. Ce sont les propriétés des gens qui avaient très tôt décidé de partir en aventure et sont revenus pour investir chez eux. Donc, pour des soucis de sécurité, ces investisseurs peuvent être tentés de repartir pour se développer ailleurs.
En définitive, il y la mise en place d’un climat politique et social apaisé. Les manifestations socio-politiques qu’on a enregistré dernièrement peuvent décourager les investisseurs. Donc ça peut amener ceux qui ont leurs propres activités à se dire que ce n’est pas facile de s’en sortir. Vu qu’ il y a des manifestations récurrentes qui peuvent perturber. Aussi cela peut dissuader certains à se lancer dans l’entreprenariat, parce que si par exemple tu es victime d’arnaque ou d’injustice et que tu n’as pas la certitude que si tu portes plainte, tu seras entendu et que tu seras rétabli dans tes droits, cela peut décourager les gens.
La mise en œuvre d’un climat socio-politique peut fixer les gens chez eux, cela peut favoriser le développement de ces localités, qui se voient parfois vidées de leurs ressources.
Merci Monsieur Diallo !
Nous étions avec Monsieur Salmane Diallo, sociologue guinéen. Nous avons abordé avec lui les questions migratoires, notamment les causes, les conséquences et les pistes de solution. Au micro, DIALLO Mamadou Saïdou depuis la Guinée Conakry. A la prochaine pour un autre numéro.
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