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Aboubacar Bah : ancien migrant aujourd’hui, engagé dans la lutte contre le phénomène
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Aboubacar Bah : ancien migrant aujourd’hui, engagé dans la lutte contre le phénomène
Mamadou Saïdou Diallo 🇬🇳
Mamadou Saïdou Diallo 🇬🇳
July 06, 2023

Pour fuir les conditions de vie dans leurs pays, plusieurs jeunes africains optent pour l’aventure vers l’occident, par la voie légale ou celle illégale, à la recherche d’une vie meilleure. D’autres partent pour se former dans le but de revenir et servir leur pays. 

Les jeunes Guinéens ne sont donc pas en marge de cette vague de migration.  Dialogue Migration est allé à la rencontre d’Aboubacar Bah, qui après plusieurs tentatives, à décidé de revenir en Guinée. Aujourd’hui, il est devenu un acteur de la lutte contre la migration illégale dans son pays.

En 2017, Aboubacar Bah a choisi de quitter la Guinée compte tenu des conditions de travail compliquées. Après sa licence universitaire en  Administration Publique en 2011, le jeune diplômé a décidé de se lancer dans l’enseignement en qualité de professeur d’Economie au lycée et de Mathématique au collège dans les établissements privés de la capitale guinéenne. Quelque temps après, il a abandonné l’enseignement. Il trouvait que ce métier n’était pas rentable. C’est ainsi  qu’il a  choisi de tenter d’émigrer dans un pays Européen pour poursuivre ses études. “Ce sont toutes ses raisons qui m’ont poussé à vouloir quitter la Guinée”, explique le jeune. 

Avant d’émigrer illégalement, Aboubacar Bah avait opté pour la voie légale. Ainsi avait-il déposé des dossiers à plusieurs reprises dans différentes ambassades. “J’ai essayé de partir par la voie légale mais je n’avais pas suffisamment de moyens pour pouvoir continuer le processus”, explique-t-il.

Le trajet 

Avant son départ, Aboubacar Bah  est passé par le chemin de la tradition, il est parti demander la bénédiction à ses parents à Labé (nord de la Guinée). C’est à partir de là qu’il a embarqué pour Agadez (Niger) par la route en passant par Bamako, au Mali.. 

Sur le chemin de l’émigration, Aboubacar se souvient des difficultés qu’il a rencontrées. “Malgré ma carte d’identité et mon passeport, on nous demandait de l’argent à chaque barrage. C’est avec beaucoup de difficultés que je suis arrivé à Niamey (capitale du Niger, ndlr), car je n’avais pas pu joindre Agadez directement” dit-il. 

A Niamey, Aboubacar fait la connaissance d’un passeur, ce dernier devrait faciliter son voyage de Niamey à Agadez. Puis, jusqu’au sud du Sahara algérien à Tamanrasset. Là-bas, le jeune guinéen s’est lancé dans la maçonnerie pour avoir de quoi vivre. “J’ai fait la maçonnerie à Tamanrasset pendant deux semaines, le temps de collecter un peu d’argent parce que je ne voulais pas tout le temps appeler la personne à qui j’avais confié mon argent pour lui demander de m’en envoyer. Ce travail m’a permis de payer mon ticket pour Oran (Algérie), pour essayer de passer au Maroc”, raconte l’ancien migrant.

Le voyage vers le Maroc a été très dur pour Aboubacar. “J’ai été battu avec d’autres voyageurs par la police aux frontières marocaine. Il nous ont arrêtés et nous ont renvoyés vers la frontière algérienne. La police algérienne nous a conduits à l’hôpital pour des soins médicaux. Nous étions dans un état critique. Ensuite nous avons été jugés et nous avions 3 mois pour quitter le pays” se souvient-il. 

En dépit de cette condamnation, Aboubacar est resté en Algérie pour chercher du travail. Il se fait engager comme ouvrier dans des chantiers. Grâce à ce travail, il a pu faire des économies et a décidé de tenter à nouveau le passage vers le Maroc. Cette deuxième tentative est une réussite. 

Une fois dans le royaume chérifien, Aboubacar a compris qu’il n’y avait pas moyen pour lui de trouver un travail comme en Algérie. “Je me suis rendu compte que le terrain n’était pas favorable pour trouver un travail et gagner un peu d’argent” Il finit par comprendre qu’il va “perdre du temps dans ce voyage”. C’est là qu’il a décidé de retourner dans sa Guinée natale. 

Il lui fallait du temps pour revenir au pays. Il devait trouver de l’argent pour payer son billet retour. Le jeune universitaire a recommencé à exercer dans la maçonnerie durant une année. Cela lui a permis d’avoir un petit montant pour entamer le voyage retour. Il a pu ainsi retourner au Niger où il s’est enregistré auprès du bureau de l’Organisation Internationale des Migrations.

Les souvenirs et la réintégration au pays

Aboubacar Bah se souvient des conditions de travail et de l’exploitation que subissent les ouvriers migrants dans les pays du Maghreb. “Les migrants ne peuvent être employés qu’en qualité de manœuvres et cela reste informel. Beaucoup de migrants sont victimes d’exploitation. Souvent, les employeurs refusent de les payer. Parfois ils sont expulsés après avoir travaillé durant un certain temps et ils ne peuvent pas percevoir leur paie. C’est plus de l’exploitation qu’un travail normal”, regrette Aboubacar Bah, sans oublier de préciser que le salaire d’un manœuvre Algérien est largement supérieur à celui d’un migrant.

“Il y a beaucoup de difficultés sur la route. A l’entrée du Maroc par exemple, outre le fait que nous avions été violentés et sévèrement battus, nous avons été victimes de plusieurs escroqueries. Ils nous considéraient comme des personnes qui n’ont aucune valeur. Vous ne comptez pas à leurs yeux. Vous n’êtes qu’un être inférieur”. Un comportement qu’Aboubacar trouve injuste et inacceptable. 

De retour au pays, l’engagement d’Aboubacar Bah  lui a permis d’être le coordinateur régional à Labé de l’Organisation Guinéenne pour Lutte Contre la Migration Irrégulière (OGLMI), une organisation qui forme un grand réseau national composé des migrants de retour qui sensibilisent aujourd’hui les candidats et les potentiels candidats à la migration illégale.  

“Je me suis engagé dans la lutte contre la migration illégale dans mon pays parce que j’ai vu les réalités sur le terrain. J’ai vécu pratiquement l’enfer de la migration illégale. Pour moi, il faut forcément que je contribue à la sensibilisation et à l’éducation de mes pairs” témoigne-t-il. Il dit avoir compris qu’en prenant le chemin de l’émigration clandestine, on accumule un grand retard dans sa vie tout en s’exposant à plusieurs difficultés.

Pour Aboubacar, le temps que l’on dédie à la migration peut nous permettre de collecter des ressources pour pouvoir se réaliser chez soi. “C’est une manière de dire à mes pairs qu’ils peuvent rester ici et travailler. Ils n’ont pas besoin de prendre des risques en empruntant la voie  illégale de la migration”

Passionné de littérature et particulièrement de la poésie, Aboubacar a publié un recueil de poèmes intitulé “Le Chant du griot” dans lequel quelques poèmes expriment le sentiment d’une mère vis à vis de la migration et du sentiment des migrants vis à vis de ces choix de migrer.

“A mon retour, il fallait me réintégrer, la tâche n’était pas facile au début. Mais aujourd’hui, je remercie Dieu. La vie pour moi est bien meilleure qu’avant que je ne tente d’émigrer. J’ai beaucoup appris sur le chemin. J’essaie de construire ma propre entreprise. C’est une fierté pour moi de pouvoir apporter ma contribution pour limiter ce phénomène, surtout qu’à l’OGLMI nous obtenons des résultats et nous arrivons à aider les jeunes migrants de retour à avoir confiance en eux et à s’intégrer plus facilement au sein de leur communauté”, précise l’auteur du “Chant du griot”.

Il traite beaucoup de thèmes concernant les réalités sociales africaines et plus particulièrement guinéennes. Cette œuvre est un ensemble de poèmes lyriques et engagés. L’œuvre est éditée le 16 février 2021 par la maison Les Plumes Inspirés.


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