Situé en plein cœur de Cotonou, au bord du Lac Nokoué, le marché Missèbo est devenu au fil des années, un espace de brassage entre diverses communautés d’Afrique de l’Ouest. S’étendant sur une superficie de cinq hectares, ce marché des fripes très populaire au Bénin, est tenu par diverses communautés venues de la sous-région et majoritairement du Nigéria.  “Dialogue Migration fait un zoom sur cet espace où la notion de nationalité se dilue dans les échanges et les brassages intercommunautaires. 

Vendredi 27 janvier 2023. C’est jour d’ouverture des balles de friperies au marché Missèbo sis dans la commune du même nom à Cotonou. Vendeurs et acheteurs grouillent dans une ambiance peu ordinaire. Entre pousse-pousse, déballage, et abordage de clients, l’ambiance est aux bonnes affaires dans ce plus grand marché de la fripe au Bénin. On y trouve des  vêtements de tous genres, des  accessoires vestimentaires (chaussures, sacs…) de seconde main importés de pays occidentaux. 

Dans ce marché, cohabitent plusieurs communautés: Nigériens, Béninois ; Ghanéens, Togolais, Sénégalais…. Et les Nigérians constituent la communauté la plus représentée. Outre le français, la langue officielle du Bénin et le Fon, la langue usuelle du pays; on y parle couramment l’anglais, le Igbo du Nigeria, le Zarma du Niger et le Mina du Togo voisin.

Alice exerce depuis huit ans dans cet espace où elle tient une petite échoppe. Cette Béninoise y vend des draps, des nappes de table et des couvertures. Elle adore l’ambiance qui règne dans cet espace, non sans affirmer que l’intégration se fait très rapidement dans ce marché multiculturel. “La cohabitation ne se fait pas sans heurts. Il arrive qu’on se querelle; mais on finit toujours par s’entendre. C’est le business qui nous unit après tout”, confie-t-elle.

De la vie en communauté africaine

A Missèbo, il y a un véritable melting-pot avec une forte communauté ouest-africaine. Il n’y a pas de discrimination ou de favoritisme dans la commercialisation des produits ou l’emplacement des stands. “On exerce pratiquement tous la même activité même si on ne vient pas des mêmes pays et on ne parle pas forcément les mêmes langues. Mais on se comprend bien et on parle business”, soutient Alice.

A quelques mètres de l’emplacement de Alice, Daniel qui vient du Nigéria essaye d’accrocher des clients. Il vend des pantalons jean. Daniel dit se sentir chez lui au Bénin où il vit depuis sept ans. Son frère qui l’a fait venir de son Nigéria natal lui a laissé son échoppe avant de rallier l’Europe. Daniel s’est bien intégré. Sa conviction: “Le Nigéria et le Bénin c’est pratiquement le même pays pour moi. Je ne me vois pas étranger ici. Je suis en Afrique de l’ouest. Je suis dans ma maison.» Il estime que les autorités béninoises ne l’embêtent pas trop même s’il arrive qu’il fasse l’objet de contrôle d’identité.

Francis lui, il vend des shorts de sport dans le marché Missèbo depuis  plus de 10 ans. Même si pour beaucoup, les affaires ne tournent plus comme avant, Francis l’analyse avec philosophie. “La situation n’est pas grave si on arrive à gérer le quotidien. C’est l’argent qui fait un peu défaut et les marchandises ne s’écoulent plus comme avant», déclare-t-il. D’origine nigérienne, il est né au Bénin en 1982. Ses parents sont des marchands nigériens précédemment installés dans le pays. Il a étudié jusqu’en classe de 5e avant de suivre les pas de ses parents dans le commerce, au début des années 2000.

Il salue la cohabitation à Missèbo. A l’en croire, avoir des nationalités différentes ne veut rien dire dans la mesure où tous les occupants des lieux sont des Africains. “Nous sommes venus pour faire des affaires et non pour se bagarrer. Et chacun d’entre nous ici peut se retrouver chez l’autre demain”, affirme-t-il.

A l’arrière du marché Missèbo, l’ambiance est plus bruyante. Sous des parasols, vendeurs et acheteurs font des affaires. Sabi, vendeur béninois court à l’affût des clients pour les conduire dans son étal en baraque. Selon le trentenaire, même si les gens viennent d’horizons différents, il faut juste cultiver le vivre ensemble. 

Ce marché est devenu un haut lieu de la fripe pour les Béninois. Et les acheteurs quittent les différentes contrées du pays, ainsi que du Nigéria voisin pour s’approvisionner en produits.

Bien que les affaires semblent bien marcher pour les marchands, ils devront bientôt tourner la page “Missèbo”, puisqu’une délocalisation vers un nouveau site situé dans la commune de Sémé-Podji est prévue. Ce, dans le but d’étendre sa capacité d’accueil pour des raisons sécuritaires. Les procédures sont en cours.