Depuis la fin de la guerre civile en Angola en l’an 2000, ce pays situé entre l’Afrique centrale et l’Afrique australe a connu un flux migratoire significatif. Il a été la destination de nombreux guinéens à la quête d’une meilleure situation socio-économique. Découvrez chez Dialogue Migration le parcours migratoire d’Amadou Diallo de 2006 à 2015.
« C’est dans le souci de soutenir ma famille que j’ai décidé de quitter la Guinée pour partir en Angola », laisse entendre tout de go Amadou Diallo qui tenait pendant six ans, avant d’émigrer, un petit commerce à Conakry dans un quartier populaire à Dabondi en l’an 2001.
Mais après tant d’années passées à scruter des potentiels clients qui n’arrivaient qu’à compte-goutte, il se rend compte que cette activité ne lui rapporte pas assez et finit par l’abandonner.
Entre-temps, il rencontre un de ses compatriotes revenus de l’Angola ; lequel l’encourage à tenter sa chance dans ce pays. C’est ainsi qu’il décide finalement de quitter Conakry pour l’Angola avec une bourse remplie de 600 dollars. Nous sommes en 2006.
Pour cela, Amadou Diallo passe par Bamako, comme la plupart des migrants guinéens en situation irrégulière. Sur la route, il n’échappe pas aux difficultés du voyage terrestre de Conakry à Luanda en passant par le Mali, le Bénin, le Congo , la République Démocratique de Congo, Tanzanie, Botswana. Seulement, après tout ce périple, il ne parvient pas à fouler le sol angolais. Sa première tentative s’étant soldée par un échec, Amadou est obligé de revenir à la case départ, en Guinée. Pour autant, il ne décolère pas. Son recul n’était que pour lui permettre de mieux sauter. Il tente une nouvelle fois le voyage et réussit à rentrer en Angola en 2009. Au péril presque de sa vie car il subit une série d’événements douloureux sur le chemin de la migration.
Avant qu’il n’arrive à destination, Amadou a osé la traversée périlleuse du fleuve Congo entre Brazzaville et Kinshasa, à endurer d’atroces souffrances aux différentes frontières – emprisonnement, bastonnade, escroquerie des passeurs entre autres -. « J’ai passé un moment au Congo Kinshasa. Je me suis rendu compte que rien ne bougeait. Tout de même, je me suis lancé durant 7 mois à faire le commerce ambulant à la fin de l’an 2006 début 2007. J’ai finalement quitté pour poursuivre mon aventure », raconte Amadou Diallo.
Dans la clandestinité, le jeune guinéen fait un accident au Congo pendant qu’il part pour l’Angola. Ils étaient 36 passagers entassés dans une camionnette, se souvient-il. « J’ai fait un accident avec d’autres voyageurs dont six de mes compatriotes guinéens. Heureusement, on a eu plus de peur que de mal. Mais, nous avons été arrêtés par la police qui nous a dépouillés de tous nos biens avant de nous mettre en prison. Pour être libre, on a dû payer 140 dollars, chacun », témoigne-t-il.
Amadou n’était pas encore au bout de ses peines. Après une vingtaine d’années, il s’en souvient toujours. « A la sortie de prison du Congo Kinshasa, j’ai été rapatrié vers le Bénin, bredouille, avec certains migrants. Connaissant le Bénin, j’ai cherché mes anciens collaborateurs pour me réintégrer dans les ++démarches de passeurs des migrants ++ entre le Mali et le Bénin. J’ai servi dans cette activité pendant plusieurs mois, avant de m’en aller en Guinée-Equatorial où j’ai travaillé dans le restaurant d’un de mes compatriotes », confia-t-il. « C’est le lendemain de mon arrivée en Guinée équatoriale que j’ai eu un emploi dans le restaurant d’un Guinéen. Au début, je percevais 2 500 FCFA/jour. Après quelques mois, je gagnais 5 000 CFA/jour », ajoute-t-il.
Après des économies qu’il a tirées de la restauration, il décide de quitter pour développer ses propres affaires.
Amadou se lance alors en Guinée-Équatoriale dans le commerce ambulant en revendant au moyen d’une charrette du pain avec du beurre, de la glace, des sandwiches etc. Comme il était souvent arrêté par la police d’immigration, cela finit par le décourager. Il décida de quitter la Guinée Equatorial pour l’Angola. Mais, il ne parviendra pas. Finalement, Amadou se résout à retourner une nouvelle fois dans son pays d’origine, la Guinée.
Quelque temps après, il reprend le chemin vers Angola en 2009, ce n’est à ce moment seulement qu’il réussit à atteindre son objectif. « A mon arrivée, je me suis confié aux ressortissants guinéens. Ce sont ces derniers qui m’ont aidé à avoir un travail dans une boulangerie. Franchement, cette activité m’a permis d’avoir de l’argent en Angola. J’ai oublié toutes les souffrances que j’ai endurées sur le chemin », soupire-t-il. Avant de s’empresser d’ajouter : « avec l’argent gagné, je suis parvenu à construire une maison en Guinée où je vis actuellement avec mon épouse et mes trois enfants dont une fille ».
Des souvenirs têtus, malgré le passage des années
Si Amadou Diallo est parvenu à tirer son épingle du jeu en Angola où il a séjourné 9 ans, les souvenirs d’un passé douloureux vécus dans un pays africain subsistent encore. Alors que lui, n’a fait l’objet d’une seule arrestation par la police d’immigration pendant qu’il était assis dans la boulangerie où il travaillait, puis libéré sous caution, plusieurs étrangers ont été arrêtés en 2015. « Cette période a été très sombre pour le pays. Les activités commerciales ont été paralysées. Gagné de l’argent n’était plus facile. C’était vraiment compliqué », ressasse-t-il, la mine attristée.
Avec plus de 10 ans d’expérience en matière d’aventure dans les pays africains, Amadou fustige le « mauvais traitement réservé aux ressortissants africains dans certains pays d’Afrique ». Amadou soutient que l’intégration des peuples africains reste un vœu pieux sur le continent. Sur ce, il conseille aux potentiels candidats à l’émigration intra-africaine ou ailleurs de tout faire pour être dans la légalité. « Sinon, prévient-il, c’est une véritable souffrance, la vie dure, l’irrespect ».
Quick Links