Dans le Sahel, le changement climatique affecte négativement la vie des populations. Les individus et les communautés de cette partie du continent africain sont touchés par la dégradation des terres et la baisse de la production agricole, les inondations de plus en plus fréquentes. Ces effets désastreux du changement climatique affectent la santé, la sécurité et le bien-être des habitants contraints à la migration, souvent dans des situations imprévues et précaires.
« La hausse des températures et les conditions météorologiques extrêmes au Sahel aggravent les conflits armés, qui détruisent déjà les moyens de subsistance, perturbent la sécurité alimentaire et provoquent des déplacements », a déclaré Andrew Harper, Conseiller spécial du HCR pour l’action climatique.
« Au final, cela obligera davantage de personnes à fuir leur foyer »
Selon un rapport du Bureau du Coordinateur spécial des Nations Unies pour le développement au Sahel et le Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), si rien n’est fait, l’urgence climatique mettra encore plus en péril les communautés sahéliennes.
« Le changement climatique au Sahel amplifie les effets des situations de vulnérabilité existantes, notamment l’insécurité alimentaire et l’instabilité politique. Les températures au Sahel augmentent 1,5 fois plus vite que la moyenne mondiale alors que les précipitations sont irrégulières et les saisons humides se raccourcissent. Même si le changement climatique est maintenu en dessous de 1,5 degré de réchauffement à l’échelle mondiale, les impacts sur le Sahel seront dramatiques », a indiqué le Rapport 2022 sur le changement climatique au Sahel produit par les Nations Unies.
Pire, alerte la même organisation dans un document en date du 16 novembre 2022 : « Même avec des politiques ambitieuses d’atténuation du changement climatique, les températures au Sahel devraient augmenter de 2,5°C d’ici 2080. Si l’action urgente est encore retardée, elles pourraient augmenter de 4,3°C ». Et dans un tel scénario, prévient l’ONU, les inondations, les sécheresses et les vagues de chaleur dévastatrices décimeront l’accès à l’eau, à la nourriture et aux moyens de subsistance, et amplifieront le risque de conflit. « Au final, cela obligera davantage de personnes à fuir leur foyer », ont fait valoir les Nations Unies.
Alors que le Sahélien migre traditionnellement pour s’adapter aux schémas saisonniers, la variabilité des précipitations et les sécheresses périodiques l’entraînent de plus en plus dans des migrations à long terme, voire permanentes. Ce changement climatique endurcit les conditions de vie dans la région, obligeant les populations à quitter leurs régions et pays d’origine. « Par exemple, en réponse à la distribution extrêmement saisonnière et unimodale des précipitations typiques de la région du Sahel, les agriculteurs de subsistance migrent vers les villes et travaillent au bord des routes, à la recherche d’alternatives sources de revenus pendant la contre-saison agricole. En outre, des saisons sèches plus longues augmentent la pression sur l’eau et les pâturages, entraînant la migration des éleveurs hors des routes traditionnelles utilisées pour la migration saisonnière avec animaux de pâturage (transhumance) », souligne le Rapport.
86 millions de personnes chassées par le climat d’ici 2050 en Afrique Subsaharienne
La variabilité climatique, en particulier la sécheresse multi-saisonnière dans les zones arides, devrait accélérer le rythme de migration interne et transfrontalière dans la région du Sahel. Les estimations les plus élevées prévoient que près de 86 millions de personnes pourraient être déplacées en 2050 en Afrique sub-saharienne en raison des effets du changement climatique, indique le rapport 2022 de l’Onu sur les changements climatiques au Sahel.
« Une étude récente révèle que sans action concrète pour le climat et le développement, jusqu’à 32 millions de personnes en Afrique de l’Ouest pourraient être contraints de se déplacer à l’intérieur de leur pays d’ici 2050, en réponse à la pénurie d’eau, à la baisse des récoltes et la productivité des écosystèmes et l’élévation du niveau de la mer, augmentée par les ondes de tempête. La même étude prédit que si aucune action n’est prise d’ici 2050, pas moins de 19,1 millions de personnes (environ 30 % de la population) pourraient être déplacées dans le seul Niger », note le document d’une centaine de pages, parcouru par Dialogue Migration.
Les politiques et programmes d’action élaborées pour atténuer les impacts
Ces dix dernières années, les liens entre le changement climatique et la migration ont indéniablement gagné en visibilité dans les programmes d’action, et les Etats et décideurs de la planète sont aujourd’hui bien plus conscients de la nécessité de traiter, de se préoccuper de ce sujet complexe.
Sur ce plan, les États de la région du Sahel ont élaboré et mis en œuvre des politiques liées au changement climatique et à la migration. Ces politiques devraient être examinées en vue d’intégrer une approche fondée sur les droits de l’homme à la fois aux politiques et à leur mise en œuvre. Bon nombre des États de la région, dont le Niger et le Nigeria, se sont engagés à accélérer la mise en œuvre du GCM (Migration ordinaire et régulière).
En vertu de l’Accord de Paris et d’autres cadres internationaux d’action pour le climat, les États de la région ont également a préparé des Contributions déterminées au niveau national (CDN) et des Programmes d’action nationaux d’adaptation (PANA) qui décrivent les engagements des États en matière d’actions d’atténuation et d’adaptation au changement climatique. Les États dans le Sahel, y compris la Mauritanie et le Niger, ont intégré des considérations relatives à la migration dans leurs CDN et les PANA, note l’Onu dans son rapport 2022 sur le Climat.
Pour les personnes qui se déplacent plus ou moins loin, à l’intérieur d’un même pays ou à l’étranger, pour une durée limitée ou de façon permanente, il y a le Cadre de l’adaptation de Cancún de 2010, qui est le premier document stratégique majeur sur le climat à inclure des questions de migration. Il fait référence à la notion de déplacements, de migrations et de réinstallation planifiée par suite des changements climatiques, pour souligner le continuum qui existe entre les formes forcées jusqu’aux formes volontaires de migration.
En outre, les effets du changement climatique sur les populations immobiles et « prises au piège » restées sur place, qui n’ont pas les moyens de quitter les zones dégradées, devraient également faire l’objet de recherches complémentaires et être prises en compte dans les politiques pertinentes. Les personnes qui migrent pour s’adapter aux effets à évolution lente peuvent avoir de plus de temps à leur disposition pour rassembler les ressources nécessaires à la migration, alors que les phénomènes soudains, en provoquant un épuisement rapide des ressources, réduisent la capacité de partir, selon le Rapport 2022 de l’OIM sur l’état de la migration dans le monde.
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