Diplômé de la Faculté des sciences économiques et de gestion (FASEG) de l’Université d’Abomey-Calavi au Bénin, Serges Alain Folly alias Alino, la trentaine, est aujourd’hui un jeune patron d’entreprise. Après un passage dans le secteur de l’éducation de son pays où il a enseigné dans des établissements secondaires, il exerce depuis plus de cinq ans dans le secteur de la restauration avec son Café-bar dénommé ‘’L’Unique, Chez Alino’’ dans les encablures de l’Université d’Abomey-Calavi. Sa reconversion dans ce secteur est le fruit de sa rencontre avec l’entrepreneuriat des Guinéens au Bénin. Il livre dans ce témoignage à Dialogue Migration, le déclic qui a fait de lui le patron qu’il est devenu.
‘’Quand j’étais étudiant à l’Université d’Abomey-Calavi, j’allais en face du campus pour manger. Il s’y trouvait un ‘’Diallo’’ (ndlr: cafétéria tenue par les Guinéens et par extension, appellation donnée aux serveurs qui y exercent au Bénin) où les étudiants allaient dîner le soir.
Si vous observez bien, à Cotonou, il y a beaucoup de célibataires. Alors, quand on finit une journée et qu’on est fatigué, on cherche à manger rapidement pour apaiser sa faim, aller vers les cafètes est alors la meilleure solution puisque rapide et peu coûteux.
En me rendant régulièrement à la cafétéria, j’ai vu l’affluence qu’il y avait. Du matin au soir, sept jours sur sept, sans discontinuer. Après mes études et faute d’emploi, je me suis lancé dans la vacation (ndlr: cours dans les établissements publics et privés) en tant que professeur.
Dans les collèges publics, j’enseignais les Mathématiques, et la Comptabilité dans les écoles privées. Ayant étudié la Gestion à l’université après l’obtention d’un Bac G, j’avais pour ambition de travailler à mon propre compte. Après quelques années dans la vacation, j’ai économisé pour me lancer dans la cafétéria. Aujourd’hui, je n’enseigne plus puisque mon rêve se concrétise. Je me suis dit qu’il faut que je me consacre uniquement à la gestion de mon entreprise…’’
La source d’inspiration de jeunes entrepreneurs Béninois
‘’Avec la fréquentation des cafétérias tenues par les ‘’Diallo’’, les Béninois ont commencé par se rendre compte que les Guinéens font un bon chiffre d’affaires. Malgré leurs conditions modestes affichées, l’on constate que ce sont des gens qui font des réalisations dans leur pays et y vivent avec un certain confort.
A travers leurs activités, ils participent à l’écoulement de plusieurs produits comme les pâtes alimentaires, les œufs, la sardine, le lait, le sucre, des produits congelés, les boissons, etc. Une opportunité pour eux aussi d’acheter en gros et revendre pour pouvoir gagner un peu plus, et donc augmenter leur chiffre d’affaires. Leur organisation et leur solidarité leur permettent d’être des acteurs sur toute la chaîne de valeur des produits, de l’importation à la distribution et le service au consommateur final.
Ce à quoi nous n’arrivons pas même si nous, Béninois, notamment la communauté à laquelle j’appartiens (Adja – Ethnie du sud-ouest Bénin, dans le département du Couffo ayant une forte représentativité à Cotonou et dans des secteurs d’activités économiques), tentons de dupliquer ce modèle, nous n’avons pas la solidarité qu’ils ont. Si bien que nos clients constatent une différence au niveau de la quantité des plats servis chez nous.
Mais au niveau de la qualité, notamment le goût on y met du nôtre. Il faut dire aussi que nous avons impulsé une modernisation des cafétérias avec des constructions et des décors attrayants. Ce qui a motivé les ‘’Diallo’’ à en faire de même. Aujourd’hui à Cotonou, toutes les cafétérias sont bien construites et embellies, offrant un meilleur visage de jour comme de nuit, alors qu’auparavant, c’était en matériaux précaires …’’
Création d’emplois et relations d’affaires entre les communautés
‘’ Après une étude de marché, je me suis installé sur le côté du retour de service en fin de journée pour permettre aux gens de pouvoir faire escale les soirs en direction de Calavi, la cité dortoir de Cotonou.
Aujourd’hui, avec la Cafétéria, on essaie de créer des emplois. Même si l’on ne peut pas dire que cela permette à ceux qu’on emploie de vivre décemment, il y a des étudiants, des artisans en fin de formations et autres qui viennent jober de temps en temps, et qui arrivent à joindre les deux bouts, payer les frais de fin de formation pour leur diplôme ou acheter du matériel pour ouvrir leur atelier…
Nous disposons d’une équipe pour la journée et d’une autre pour la soirée. Nous cohabitons en parfaite harmonie avec la communauté guinéenne de notre secteur, avec qui nous échangeons de temps à autre sur l’organisation de notre secteur et la fixation des coûts de nos rations et produits, même si parfois le cours du marché nous autorégule.’’
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